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Discours du capitaine Ibrahim Traoré : Encore de la propagande servie aux citoyens ?

lundi 2 janvier 2023


Ceci est un décryptage du discours du président de la transition, le Capitaine Ibrahim Traoré à l’occasion de la fête du nouvel an 2023. Analyse des contours de l’adresse du chef de l’État par le journaliste Ibrahim Billa.

Aussi vieux que la fonction de chef de l’Etat, l’exercice d’adresse à la nation à l’occasion du nouvel an, est une tradition à la fois institutionnelle et républicaine.

C’est pourquoi, le président de la transition, le capitaine lbrahim Traoré, n’aurait pu s’y soustraire. D’autant plus quà sa prise du pouvoir par la force des armes, le 30 septembre dernier,il a, dans la foulée, laissé entendre que tout était urgent et qu’il fallait faire, durant les trois mois restants de l’année, plus qu’il na été fait pendant les huit mois, de son prédécesseur, le lieutenant-colonel Paul Henri Sandaogo Damiba, parvenu lui aussi au pouvoir par les armes. Ainsi donc, le capitaine lbrahim Traoré était dans l’obligation de s’adresser aux Burkinabè. Et tant mieux qu’il l’ait fait ! Mais concrètement, que leur a-t-il dit ? Que ne leur a-t-il pas dit ? Qu’aurait-il pu leur dire ? A-t-il su les convaincre ?

L’allocution aura duré une dizaine de minutes. Elle a permis au numéro un de la République de parler et ce, depuis Solenzo, chef-lieu des Banwas, à ses concitoyens.

Le symbole est fort, est-on tenté de dire. Car l’on s’en rappelle. Cette ville, chef-lieu de province, tombée depuis plusieurs mois, entre les mains des groupes armés, a été annoncée libérée par l’armée en décembre dernier. Une annonce qui a, ensuite été confirmée, le 10 décembre, par le chef de lT’Etat himself, dans son message à la nation, à l’occasion de la fête de l’indépendance.

Se rendre donc à Solenzo pour s’adresser à la nation, constitue en lui-même, d’un point de vue communicationnel, un message non moins important. Le chef de l’Etat tente par-là de convaincre ses compatriotes toujours septiques, que la ville a non seulement bel et bien été reconquise, mais qu’elle reste sous le contrôle total des forces étatiques engagées à la conserver. Il le dira d’ailleurs lui-même quand il laisse entendre que « la reconquête est bien, certes, mais la consolidation est celle qui va commencer maintenant ».

Mais en vérité, pour cette adresse à la nation du président Traoré, d’aucuns s’attendraient à un discours-bilan basé sur des chiffres et faits aussi bien vérifiables que quantifiables en termes de victoires ou d’avancées significatives dans la lutte contre les groupes armés terroristes. Après l’avoir suivis, ces derniers seront loin d’être satisfaits.

En revanche, ceux qui n’attendaient qu’à être convaincus qu’il y a de l’intention, la volonté, la sincérité et par ricochet, la lisibilité dans son engagement à lutter contre le terrorisme, auront quant eux, eu de quoi être satisfaits. En effet, l’adoption pour le besoin de l’exercice, de la posture de chef de guerre, le caractère naturel du ton employé, les prières, hommages et innombrables messages d’encouragement et de compassion aux soldats ainsi qu’à leurs familles respectives, ont convaincu et raviver l’espoir de plus d’un Burkinabè.

Dans ce sens, le président Ibrahim Traoré, a su se montrer, un chef de guerre humaniste et compatissant vis-à-vis, non seulement de ses soldats, mais aussi de son peuple. Ce à qui n’est pas sans effets émotionnels chez nombre de Burkinabè.

Cette émotion de ses concitoyens en sa faveur, permet d’indiquer que l’objectif du chef suprême des armées à cet effet, a bien été atteint, le discours ayant donc suscitéla réaction attendue chez sa cible. Les spécialistes en sciences d’analyse de discours
pourront qualifier cela de réussite totale sur le plan de ce qu’ils appellent « le pathos.

Quant au « logos », c’est-à-dire le discours lui-même, il a été, de notre point de vue,
mesuré et donc, rationnel et réaliste. Le chef de l’Etat reconnait ainsi très subtilement devant ses compatriotes, que les résultats engrangés sur le terrain des opérations restent encore mitigés. On l’aura d’ailleurs cerné, quand il évoque « des victoires çà et là », sans pour autant en donner la teneur et l’envergure exactes.

Enfin, soulignons que cette adresse du président Traoré a été axée sur trois volets
principalement. D’abord, elle se veut un message d’encouragement et surtout de motivation des hommes. Les éléments d’appréciation à ce sujet, sont indénombrables.

Le deuxième volet de ce discours, est consacré à la réorganisation et à l’équipement de l’armée. Sur ce point, beaucoup de burkinabe resteront sur leur soif, le chef de l’État , n’en ayant pas dit plus. Or, il aurait pu indiquer où en est-il exactement sur cette question curiale qui préoccupe aussi les citoyens. Nul besoin de signifier que les victoires de nos forces sur le terrain en dépendront énormément.

Quant au troisième volet, il se rapporte a la question de la gouvernance. A ce niveau, l’on remarquera la volonté affichée, du chef de l’Etat de revoir de fond en comble le système de gouvernance du pays. Et c’est sans doute pour y parvenir, qu’il annonce un cadre de concertation qui devrait être bientôt lancé par le premier ministre. Bien que cela avait été annoncé par le MPSR dans ses déclarations de la prise du pouvoir, on est tout de même tenté de se poser bien de questions.

Le capitaine Ibrahim Traoré a-t-il pris conscience de ce qu’il ne saurait avoir de résultats notables sans une telle concertation ? Si non, pourquoi est-ce maintenant qu’il envisage de convoquer cette idée qui semblait jusque-là mise aux oubliettes ? Ou, est-ce enfin l’inclusion tant exigée dans la conduite de la transition par certains leaders politiques et organisations de la société civile qui se concrétise ?

Quoiqu’il en soit, l’idée en elle-même n’est pas mauvaise. Cependant, il faudra éviter qua l’issue de sa concrétisation, elle ne soit vue comme « un partage de gâteau entre civils et militaires » pour le reste de la transition.

Toujours sur ce volet de l’allocution, il est incompréhensible que le président n’ait annoncé aucune mesure dans le sens de soulager la souffrance de ses concitoyens, notamment vis-à-vis de la vie chère. De même, il est plus que regrettable qu’il ne se soit prononcé sur la crise du carburant qu’a connue le pays ces derniers jours, ne serait-ce que pour saluer la ténacité des populations. Rien ne saurait justifier qu’il passe sous silence cette actualité, à moins que, l’adresse ait été enregistrée avant la survenue de la crise.

Heureuse année 2023 à tous ! Que Dieu ramène la paix au Faso.

lbrahim BILLA
www.touteinfo.com}

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